Jalal Toufic,
Le Retrait de la tradition suite au désastre démesuré
Après des décennies de guerre, de destructions, d’occupations, le monde arabe apparaît comme un monde en ruines. Mais il y a des ruines qui résistent aux reconstructions, les ruines immatérielles qui résultent de « désastres démesurés ». Cette notion renvoie au premier chef aux nombreuses années de guerre qui ont ravagé le Liban, mais elle désigne plus généralement les atrocités du XXe siècle, le génocide rwandais, ou encore la Shoah. L’artiste doit ressusciter le « non-mort » et amener la communauté à prendre conscience de son objet perdu. Il n’y a là nulle trace de nostalgie, nul désir de retour à une origine ou à une tradition authentique. L’artiste se situe ainsi dans le mince interstice séparant la mort de la vie. À travers une analyse essentiellement fondée sur la photographie et le cinéma, l’auteur nous offre une réflexion rare sur les pouvoirs de l’art et sur sa fonction politique, faisant écho aux analyses de Maurice Blanchot, Jacques Derrida, ou Georges Didi-Huberman.