Pierre Bergounioux,
École : Mission accomplie
Si l’on met de côté les éternels laudateurs de l’école républicaine – ministres en représentation, sociologues de cour et pédagogues satisfaits –, dont la position commande les propos, on constate qu’aujourd’hui le discours dominant sur l’institution scolaire est empreint d’un formidable pessimisme : l’école est « en crise », tragiquement victime de ses « dysfonctionnements internes ».
Dans École : mission accomplie, Pierre Bergounioux nous invite à reconsidérer posément les termes de l’analyse. Et si, au contraire, l’école n’avait jamais aussi bien fonctionné, manifestant une redoutable efficacité à perpétuer les rapports de domination ?
En revenant en profondeur sur sa longue expérience de professeur de français, au carrefour de la langue et de la littérature, Pierre Bergounioux analyse la manière dont s’est façonné un nouvel imaginaire de l’école : celui de l’« égalité des chances ». Ceux qui échouent sont désormais convaincus de leur indignité, incapables de penser que, peut-être, cet échec pourrait avoir des causes extérieures à eux-mêmes ; les autres, à qui tout réussit, se voient dotés d’une légitimité symbolique nouvelle.
C’est à la fiction d’une société pacifiée, où l’école ne ferait qu’entériner des capacités inégalement réparties, qu’il nous est ainsi demandé de croire.
Entretiens avec Frédéric Ciriez et Rémy Toulouse