Le Néolibéralisme

Cet ouvrage tente de formuler une théorie de la société et de l’histoire modernes visant à identifier la nature du néolibéralisme et son impact sur les conditions d’existence, les pratiques et les perspectives des êtres humains d’aujourd’hui. Les grands débats de société, depuis plusieurs siècles, ont eu pour pivot la relation entre marché et organisation. Marx aborde le capitalisme en termes de structure, comme l’instrumentalisation du marché, de la rationalité marchande, par la marchandisation de la force de travail. Mais c’est en termes de tendance historique de cette structure concurrentielle, qu’il en vient à l’organisation, traitée à partir du développement de la grande entreprise. Il la décrypte comme une autre sorte de rationalité, aujourd’hui entre les mains des capitalistes, mais qui finira par leur échapper et fournira, après l’abolition de la propriété privée et du marché, le tissu même du socialisme. La théorie de Marx comporte deux insuffisances. D’abord, l’analyse du pouvoir. La lutte de classe est une lutte entre trois pôles, et non pas deux : la classe populaire, la classe dirigeante, et la classe capitaliste. La théorie proposée ici fait tenir tout ensemble des concepts venus notamment de Marx, Gramsci, Foucault et des recherches sur la globalisation. Elle nous permet de situer le néolibéralisme dans un ensemble de régimes d’hégémonie, d’analyser finement son fonctionnement et de voir qu’il ne constitue pas l’horizon de la postmodernité, mais le point de départ d’une modernité « ultime ».

Est-ce ainsi que les hommes vivent ?

Ici nul roi ne convoque des États généraux. Nous sommes, dit-on, le peuple souverain, celui d’une démocratie, mais nous sommes un étrange souverain à qui l’on propose de choisir des candidats aux élections en le privant régulièrement de débats qui devraient donner un sens à la représentation.
Alors pourquoi ne pas réécrire les doléances, des cahiers de doléances contemporains ?

Ouvrage coédité avec Excès

Luce Faber

Luce Faber est un collectif qui porte l’espérance de tout ce qui s’éclaire par la raison, ici et à l’horizon. Raison sensible et partagée, elle tente d’en faire bon usage, elle fabrique, elle invente, elle recueille les voix publiques qui ont formulé ces doléances. Avec Luce Faber, la lumière est une tribu.

Sophie Wahnich

Sophie Wahnich est directrice de recherches au CNRS-EHESS. Elle est notamment l’auteur de L’impossible citoyen : l’étranger dans le discours de la Révolution française (1997, nouvelle éd. Albin Michel, 2010), de La liberté ou la mort (La Fabrique, 2003), et de La longue patience du peuple. 1792, naissance de la République (Payot, 2008).

Histoire d’un trésor perdu

La Révolution française a été taraudée par une question : comment transmettre l’événement inouï aux générations qui ne l’auront pas vécu ? Les révolutionnaires ont alors cherché à inventer des institutions civiles qui permettraient d’entretenir le souvenir, mais surtout une tenue, une manière révolutionnaires d’être au monde. Cette question, ces institutions, les lieux et les pratiques qu’elles ont fait surgir, sont autant de laboratoires sociaux sensibles pour comprendre comment l’événement depuis 1789 a été régulièrement réinvesti mais aussi dénié, renié, travesti, désinvesti, au point de devenir une sorte de « trésor perdu » pour des héritiers sans testament. La Restauration, les années 1830-1848, le Second Empire, la Commune de Paris, la Troisième République, le début du XXe siècle socialiste, les années sombres, ont métabolisé cette séquence brève dans de grandes discontinuités. Et les affrontements mortifères ont perduré de la Seconde Guerre mondiale à aujourd’hui. Loin d’une signalétique ambiguë faite de bonnets phrygiens, de bastilles à prendre et autres constituantes, ce livre invite à ne rien imiter mais aussi à ne rien négliger d’une histoire qui n’a pas été seulement libérale, d’une transmission qui n’a pas été seulement historiographique. Il invite, plus simplement, à retrouver la Révolution comme référence émancipatrice.

Les contributeurs :

Jolène Bureau prépare une thèse à l’université du Québec à Montréal (Canada), intitulée « Souvenirs de l’an II – 1793-1794 : du marché de la mémoire à l’historiographie de la Révolution française, 1815-1850 ». Ses recherches portent sur la « légende noire » de Robespierre, la mise en récit de Thermidor et les représentations de la Révolution et de l’idée de révolution dans l’historiographie, la littérature et au cinéma.

Marc Deleplace est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Paris-Sorbonne, Centre d’histoire du XIXe siècle. Il est l’auteur de L’anarchie de Mably à Proudhon (1750-1850) : histoire d’une appropriation politique, Lyon, ENS Éditions, 2001.

Jean-Numa Ducange est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Rouen. Il a publié La Révolution française et la social-démocratie : transmissions et usages politiques de l’histoire en Allemagne et Autriche 1889-1934 (PUR, 2012), et Socialisme et Révolution française (choix de texte de Kautsky et Jaurès, Demopolis, 2010).

Emmanuel Fureix est maître de conférences à l’université Paris-Est Créteil, Centre de recherches en histoire européenne comparée (CRHEC), membre de l’Institut universitaire de France. Il est l’auteur de La France des larmes. Deuils politiques à l’âge romantique, 1814-1840 (Champ Vallon, 2009, prix Chateaubriand).

Anna Karla était membre du groupe de recherche « La France entre Révolution et Restauration » à l’Institut historique allemand. Elle prépare une thèse en co-tutelle sur les Mémoires de la Révolution à l’EHESS et à l’université Humboldt de Berlin.

Olivier Le Trocquer est professeur agrégé d’histoire au lycée Rabelais à Paris, il a écrit de nombreux articles sur la mémoire et l’interprétation du 4 septembre 1870. Il travaille sur la construction de l’événement et les mémoires des années 1850-1880.

Guillaume Mazeau est maître de conférences en histoire moderne à l’université Paris-1 Panthéon Sorbonne, Institut d’Histoire de la Révolution française. Il est l’auteur du Bain de l’histoire (Champ Vallon, 2009).

Nathalie Richard est professeur d’histoire contemporaine à l’université du Maine (Le Mans, France), chercheuse au Centre de recherches historiques de l’Ouest et chercheuse associée au Centre Alexandre Koyré. Ses travaux portent sur l’histoire des sciences humaines et sociales au XIXe siècle. Elle a notamment publié Alfred Maury, érudit et rêveur. Les sciences de l’homme en France au milieu du XIXe siècle (avec Jacqueline Carroy, Presses universitaires de Rennes, 2007) et Hippolyte Taine. Histoire, psychologie, littérature (Garnier, sous presse).

Matthieu Giroud

Matthieu Giroud était géographe, maître de conférence à l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée. Il est l’auteur de nombreux articles, et a coordonné plusieurs ouvrages, notamment D’une métropole à l’autre. Pratiques urbaines et circulations dans l’espace européen (avec C. Imbert, H. Dubucs, F. Dureau, Paris, Armand Colin, 2014).

Villes contestées

La ville ne peut plus se contenter de discours aseptisés, consensuels ou politiquement corrects. Le capitalisme mondialisé contemporain affecte si profondément les espaces urbains qu’il anéantit les idéaux de liberté, de rencontres et d’émancipation que les villes incarnaient naguère. Celles-ci méritent d’être bousculées, chahutées, contestées, et c’est précisément ce que ce recueil se propose de faire en réunissant pour la première fois un ensemble d’auteurs dont la critique n’épargne ni les espaces urbains, ni les élites qui les façonnent et les gouvernent. Les 11 textes rassemblés ici, traduits pour la première fois en français, constituent un panorama cohérent et exhaustif de la radical geography : les analyses, qui portent sur la gentrification, sur la financiarisation de la production urbaine, sur la dépossession du plus grand nombre de certaines ressources urbaines, sur les trompe l’œil que représentent le développement durable, la mixité sociale ou le multiculturalisme, sur les dispositifs de surveillance et de contrôle des populations, ou plus globalement sur les formes de domination qui régissent les rapports sociaux, sont unies par la volonté de pointer les contradictions urbaines du système néolibéral. Cet ouvrage, par sa double vocation pédagogique et militante, participe ainsi du projet d’émancipation voulu par les géographes radicaux, et défendu sur le terrain par un nombre croissant de citadins en lutte.

Paradis infernaux

Série d’études urbaines saisissantes sur Le Caire, Pékin, Johannesburg, Dubaï, Kaboul, Managua, etc., cet ouvrage pourrait être l’anti-guide des « mondes de rêve » engendrés par le capitalisme contemporain. L’imaginaire qui préside à ces nouvelles formes d’utopie est celui de l’enrichissement sans limites, de l’hyperbole constante, des dépenses somptuaires, de la sécurité physique absolue, de la disparition de l’espace public… Mais cette débauche réservée aux riches ne donne lieu à aucune expérience réelle ; elle est tout entière branchée sur les fétiches de la fantasmagorie mondiale, harnachée aux mêmes idéaux figés du marché global. L’absence d’horizon qui caractérise notre monde se redouble, dans ces outre-mondes, d’une violence faite aux pauvres, massés, toujours plus nombreux, derrière les frontières visibles ou invisibles qui transforment le territoire des riches en autant d’enclaves néo-féodales.

Soyez réalistes, demandez l’impossible

La crise actuelle n’est pas seulement de nature économique. L’effondrement que les pays occidentaux connaissent depuis 2008 a exacerbé une crise politique qui couvait depuis longtemps. De gesticulations en réunions au sommet, les gouvernants et leurs experts se révèlent incapables de rompre avec le néolibéralisme et n’ont qu’un mot à la bouche : austérité. Dans une prose acérée, Mike Davis analyse les causes d’un aveuglement qui conduit le monde entier vers la catastrophe. Mais c’est aussi dans ce contexte qu’est apparue une lueur d’espoir, d’Athènes à New York en passant par Madrid. Rassemblant souvent de nouveaux militants, des mouvements populaires comme Occupy sont partis à la reconquête de l’espace public, médiatique et politique. L’auteur salue la fièvre qui s’est emparée de pays que l’on croyait amorphes, raconte des vies militantes, réfléchit sur les leçons à tirer des mouvements de révolte passés et propose des solutions pratiques pour inscrire la contestation dans la durée. La situation impose de choisir entre un radical changement de cap et la mort à laquelle nous condamnent les politiques de rigueur. La gauche doit donc cesser d’être timorée ou simplement réactive pour construire une alternative concrète sur les plans politique, économique, social et écologique. Soyez réalistes, demandez l’impossible !

Le stade Dubaï du capitalisme

Village devenu métropole mondiale en moins de vingt ans, lieu de tous les superlatifs, Dubaï pourrait bien signaler l’émergence d’un stade nouveau du capitalisme, encore inconnu sous nos cieux : un système à la fois plus ludique, par la généralisation du loisir touristique et de la jouissance commerciale, et plus violent, entre chantiers esclavagistes et politique de la peur, grâce aux guerres qui font rage de l’autre côté du Golfe persique – soit une société sans vie sociale ni classe moyenne, pur mirage de gadgets sans nombre et de projets pharaoniques. L’analyse de Mike Davis pointe les rapports de force à l’œuvre derrière le phénomène Dubaï ; elle est complétée par une réflexion de François Cusset sur les défis posés aux démocraties occidentales par l’insolente réussite de Dubaï, Inc.

Dead Cities

La Grande Ville capitaliste, depuis son émergence, n’a cessé d’être associée au spectre de sa destruction. S’inscrivant dans la tradition marxiste d’Ernst Bloch, Mike Davis affirme que l’aliénation cognitive produite par la mise au ban de la nature a suscité une angoisse constante tout au long du XXe siècle. Dans une veine à la fois mélancolique et optimiste, l’auteur invite à une nouvelle science urbaine qui s’appuierait sur la « dialectique ville-nature ». Celle-ci permettrait d’envisager la ville dans la totalité des interactions qu’elle entretient avec son « dehors naturel », et de déjouer les limites actuelles des études urbaines. Cela passe ici par un travail spéculatif s’appuyant sur une hypothèse – la disparition de l’homme – et sur un extraordinaire corpus littéraire et scientifique, où les espèces végétales dansent sur les cendres de nos villes mortes.

Mike Davis

Mike Davis poursuit depuis plus de vingt ans un travail d’anthropologie urbaine qui fait se rencontrer critique des rapports de domination et exploration des paysages imaginaires. Il est notamment l’auteur de City of Quartz (La Découverte).

Gouverner par la dette

« Que devient l’homme endetté pendant la crise ? Quelle est sa principale activité ? La réponse est très simple : il paye. »

Experts, hommes politiques et éditorialistes sont unanimes : la dette qui grève les finances publiques entrave la croissance, fait exploser le chômage. Les États doivent à tout prix se désendetter s’ils veulent rassurer les marchés et retrouver le chemin de la prospérité. Le diagnostic de Maurizio Lazzarato est tout autre : la dette, dans le système capitaliste, n’est pas d’abord une affaire comptable, une relation économique, mais un rapport politique d’assujettissement et d’asservissement. Elle devient infinie, inexpiable, impayable, et sert à discipliner les populations, à imposer des réformes structurelles, à justifier des tours de vis autoritaires, voire à suspendre la démocratie au profit de « gouvernements techniques » subordonnés aux intérêts du capital.
La crise économique de 2008 n’a fait qu’accélérer le rythme de formation d’un « nouveau capitalisme d’État », qui organise une gigantesque confiscation de la richesse sociale par le biais de l’impôt. Dans un inquiétant retour à la situation qui a précédé les deux guerres mondiales, l’ensemble du procès d’accumulation est tout entier gouverné par le capital financier, qui absorbe des secteurs qu’il avait jusqu’alors épargnés, comme l’éducation, et qui tend à s’identifier avec la vie même. Face à la catastrophe en cours et au désastre qui s’annonce, il est urgent de sortir de la valorisation capitaliste, de nous réapproprier nos existences, savoir-faire, technologies et de renouer avec le possible en composant, collectivement, un front du refus.