Roger Ekirch,
La Grande Transformation du sommeil
Comment la révolution industrielle a bouleversé nos nuits
Écrire l’histoire du sommeil, c’est lui restituer son caractère éminemment politique.
Contrairement à l’opinion courante, le sommeil d’un bloc d’environ huit heures n’a rien de naturel. Cette manière de dormir ne s’est répandue que très récemment, dans le sillage de la révolution industrielle, à la faveur de la généralisation de l’éclairage artificiel dans les villes et de l’imposition d’une nouvelle discipline du travail. Auparavant, le sommeil était habituellement scindé en deux moments, séparés par une période de veille consacrée à diverses activités comme la méditation, les rapports intimes ou encore le soin des bestiaux.
Telle est la thèse révolutionnaire de Roger Ekirch. Son enquête passionnante sur le bouleversement de nos nuits qu’a constitué la disparition, puis l’oubli du sommeil biphasique a doté cet objet d’une historicité qui lui était jusque-là déniée et conduit à l’émergence d’un nouveau champ de recherche, les Sleep Studies. Surtout, cette découverte invite à questionner l’identification de l’insomnie de milieu de nuit à un « trouble du sommeil ». Et à envisager les conséquences d’une transformation qui nous a barré un accès privilégié aux rêves et, par-là, à la conscience de soi.
« La lettre du mardi. À la recherche du sommeil perdu », Martin Legros, Philosophie Magazine, 28 mai 2024.
« Deborah Levy, Neal Cassady, Roger Ekirch... La sélection des livres de poche de la semaine », Olivier Pascal-Moussellard, Télérama, 18 mai 2024.
« Sommeil biphasique : quand nos ancêtres se réveillaient la nuit », France Culture, Twitter, 30 mars 2024.